Le Mexique est un pays dont j'ai fait la connaissance en 1995, par hasard. Et depuis, je suis resté coincé. 

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lundi 21 janvier 2013

Le zoo de Moctézuma

Suite à l'article sur la Torre Latino Americana (plus bas sur cette page), Delfina m'a questionné sur le zoo de Moctézuma, à l'emplacement duquel fut construite ladite Tour.
A titre d'explications, je citerais ces quelques lignes, extraites de l'ouvrage d'Albert Staline "Lui, Moctézuma ; Je l'ai bien déchu".
C'est Hernán Cortés qui raconte. A cet instant du roman, il détient prisonnier Moctézuma, l'empereur Aztèque qu'il a capturé sans (encore) coup férir.

"(...) La cellule de Moctézuma est luxueusement aménagée et je le laisse libre d’aller et de venir, privilège dont il n’abuse guère, passant la majeure partie de la journée vautré sur des coussins, à grignoter, rêvasser ou à se faire sucer par de jeunes gens.
Nous sortons parfois, faisant palanquin commun et accompagnés d’une garde réduite. Il me fait les honneurs de la cité (Tenochtitlán - México - NDB) qui m’apparaît chaque fois plus grande et plus belle. Un jour il me convie à la visite de son zoo personnel. 
La chose est à classer dans la catégorie « extraordinaire », jugez donc :
Dans un luxe de décoration, Moctézuma s’est offert un chouette zoo privé. Difficile d’évaluer la surface au sol de l’établissement mais c’est vaste. Trois grandes zones sont distinctement séparées, chacune dédiée à une grande espèce. Des centaines d’esclaves surveillent, nourrissent, bichonnent, lavent. On pourrait manger par terre tellement c’est nickel-chrome. Et même pas ça pue, c’est vous dire.
Zone un : les zoziaux. 
Soit en cage individuelle, soit en volière de groupe, oiseaux de mer ou de rivière, il y a là toutes les espèces que l’on rencontre en Europe, plus de nombreuses autres que je ne connais pas. Chaque cage fait bien cinq mètres de haut et se trouve close, sur le dessus, à moitié par un filet, à moitié par des tuiles de terre (Adobe - NDB). On sent dans la variété des espèces représentées une volonté non pas d’exotisme, mais d’exhaustivité : certaines cages contiennent de simples poulets ou dindons, d’autres des perroquets multicolores, d’autres de petits volatiles au charmant pépiement et d’autres enfin hébergent de hideux rapaces au coup déplumé et au crâne chauve qui me rappellent Sauniez, un de nos ex-compagnon qui avait trouvé la mort de façon fort divertissante dans le tome 1.
Visite amusante, mais bon, les oiseaux, faut être amateur. Pour ma part, sorti d’un bon dindon rôti, hein ?
Dans la zone deux, sont regroupés les animaux dangereux. 
Les cages, plus vastes et plus solides renferment un ou plusieurs animaux d’une même espèce et encore une fois, l’échantillonnage est impressionnant : jaguars, lions, tigres ou je ne sais quoi, renards, loups, gros chats à l’air sournois, crocodiles. Tout ce brave monde est logé style quatre étoiles, avec reconstitution du milieu naturel, eau chaude à tous les étages et mini bar garni. La nourriture semble provenir en tout ou partie des pensionnaires excédentaires de la zone un.
Visite sympa, mais bon, les fauves, faut être connaisseur. Pour ma part, sorti d’un bon ragoût de chat, hein ?
C’est la zone trois la plus marrante. 
La visite vaut le détour, et je vous y invite ci-après :
Le père Moctézuma, en bon esthète de l’art qu’il est, s’est constitué une putain de collection de tout ce qui peut se trouver comme monstruosité humaine. Ça va du plus classique nain, jusqu’au monstre difficilement identifiable, de l’albinos le plus blanc au nègre le plus noir, du bossu de Notre-Dame à Elephant-man. C’est tellement pire que je le soupçonne d’avoir fait fabriquer quelques prototypes uniquement pour sa collec’. Il y en a des qui sont visiblement nés comme ça et d’autres qui paraissent avoir eu une enfance difficile. 
Vous voulez une femme à deux têtes : il a. 
Un enfant sans bouche et qui mange par l’anus (de la soupe uniquement, sans sel et avec une paille) : il a. 
Une paire de jumelles avec étui et courroie, soudées par le clitoris, il a. 
Un homme à cinq bites avec un gant comme slip, il l’a depuis peu. 
L’homme poisson avec sa raie sur la tête est actuellement chez le coiffeur et ne devrait pas tarder à rentrer (à la nage). 
Un homme à tête de chou, il a. 
Une fabricante de pipes aux dents branlantes, il a. 
Un noir à trois jambes qui bat tout le monde à la course, il a.
Une femme à barbe, une femme à poil, il a aussi.
L’homme-grenouille qui a toujours la raie nette, c’est ici. L’homme-pélikangourou avec une poche ventrale sous le bec, c’est ici aussi. L’homme-tronc qui grimpe aux arbres, la femme-sangsue qui te suce jusqu’au sang, la femme à lunette qui a une quéquette, l’homme-clé qui ouvre toutes les serrures, l’homme à tout faire qui fout rien, c’est tout ici.
Chacun de ces malheureux ne semble pas malheureux, disposant d’une chambre individuelle et d’une cohorte de serviteurs/serviteuses à son service. D’ailleurs l’une d’elle s’occupe, agenouilée, du noir à trois jambes mentionné plus haut. En fait c’est pas une jambe, celle du milieu. Simplement, il court vraiment très vite et c’est pour ça qu’il gagne tout le temps.
On traîne un bon moment parmi les cages, essayant de nouer par-ci par-là un improbable dialogue avec l’une ou l’autre de ces créatures. 
Bon allez, on rentre au palais, j’ai une insurrection Aztèque à gérer. (...)"


Moctézuma exhorte ses sujets au calme
depuis le balcon de la résidence de Cortés à Tenochtitlán-México.
Il sera mortellement blessé à la tête par une pierre.
Museo del Virreinato, Tepozotlán.

Pour info : 
"Le premier « zoo humain » en Amérique semble être celui de Moctezuma à Mexico, qui, en plus d'exhiber de vastes collections d'animaux, montrait aussi des êtres humains anormaux : albinos, nains, bossus."